Références gastronomiques

Nina Métayer, la Délicatisserie

23 mars 2023
Portrait de la cheffe pâtissière Nina Métayer.

Nina Métayer nous invite à découvrir son univers gourmand à travers sa pâtisserie digitale, la Délicatisserie. Après avoir travaillé au sein de palaces parisiens et de grandes maisons, la cheffe a fait le choix de l’indépendance. Engagée, cette maman de deux petites filles met le respect de l’humain au coeur de l’entreprise, que ce soit à travers la sélection de ses matières premières, la bienveillance envers son équipe ou sa volonté de proposer le meilleur à un prix juste pour que ses créations soient accessibles au plus grand nombre. Un témoignage sincère, motivant et déculpabilisant !

La "Fleur", une pâtisserie fine créée par la Délicatisserie.

1- Quel est votre parcours ?

À l’âge de 16 ans, j’ai décidé de partir seule un an au Mexique. Sur place, j’ai rencontré un couple de boulangers passionnés par leur métier. De retour en France, j’ai passé un Bac Littéraire puis un CAP boulangerie. J’ai fait un apprentissage chez Paillat, à La Rochelle puis je suis partie travailler en Australie où j’ai découvert l’univers de la pâtisserie. À mon retour, j’ai passé un CAP pâtisserie à l’école Ferrandi sur Paris. À la suite de ça, j’ai intégré le Meurice en qualité de commis pâtissier, puis l’Hôtel Raphaël ***** et le Grand Restaurant de Jean-François Piège comme cheffe pâtissière. Enfin, j’ai eu la responsabilité des créations sucrées destinées à la France et à l’international du Café Pouchkine.

2- Quand avez-vous fait le choix de l’indépendance ? 

Je me suis installée à mon compte en 2019. J’ai commencé par faire du conseil, de l’événementiel et des recettes dans un studio. En parallèle, j’ai ouvert une boulangerie-pâtisserie à Londres. J’ai inauguré la Délicatisserie en 2020. Avec mon équipe, nous produisons chaque jour à la demande au sein de notre laboratoire situé à Issy-les-Moulineaux. Au début les commandes se faisaient uniquement sur le site. Aujourd’hui, il est possible de déguster nos réalisations sur place ou à emporter au Printemps du Goût et aux Halles d’Issy-les-Moulineaux.

Ce qui est important pour moi : le respect de l’humain.

3- Pourquoi avoir fait le choix d’ouvrir une pâtisserie digitale ?

Quand j’ai envisagé de me lancer en tant qu’indépendante, je me suis demandée ce qui était important pour moi. Le respect de l’humain s’est vite imposé. Cela passe par plein de choses : le respect du producteur qui va s’occuper avec soin de son élevage. Bien traitées, ses vaches vont produire un lait de qualité et un beurre extra. Cela passe aussi par une équipe heureuse de travailler avec des beaux produits et fière des gestes artisanaux qu’elle réalise pour transformer la matière première en une pâtisserie fine qui sera vendue au juste prix.

4- Quels sont les avantages d’une boutique en ligne ?

Être responsable et engagée était important à mes yeux quand je me suis lancée. Travailler via un système de pré-commande nous permet de produire au fur et à mesure des demandes et de ce fait, de ne rien jeter. En outre, ce système nous laisse plus de temps pour nous focaliser sur le sourcing des produits. Après, je ne dis pas qu’il n’y aura jamais de boutique physique. 

À travers mon parcours, j’ai envie de montrer aux femmes que c’est possible.

5- Être une femme dans ce métier a-t-il parfois été difficile ?

Il est vrai qu’en tant que femme, on est forcément moins prise au sérieux, mais c’est le cas dans tous les métiers. J’ai constaté que certaines portes s’ouvraient plus difficilement mais il faut savoir s’imposer. 

À travers mon parcours, j’ai envie de montrer aux femmes que c’est possible. Je pense qu’il est important de pouvoir se raccrocher à des figures féminines pour avancer. J’écoute d’ailleurs beaucoup de témoignages d’entrepreneuses qui évoquent avec sincérité les difficultés qu’elles ont eues à surmonter. Leur retour d’expérience me rappelle que je ne suis pas seule, que tout comme moi elles ont eu des tempêtes à traverser mais que c’est le chemin pour y arriver. 

6- Vous êtes entrepreneuse, maman de deux petites filles et vous préparez le concours de MOF. Comment faites-vous pour tout gérer ?

Je n’ai pas été sélectionnée. Ce n’est pas grave, ça fait partie du jeu quand on s’inscrit (sourire). Néanmoins, préparer ce concours nécessite beaucoup d’engagement et de travail. C’est une décision qui se prend en famille, en couple. Il faut que tout le monde soit partant. Se lancer dans une préparation longue et exigeante nécessite de moins voir ses enfants, de passer moins de temps en famille. Bien évidemment, ce n’est pas toujours facile quand on passe des jours, des nuits, des week-ends, des vacances à s’entrainer loin des siens. Mais c’est aussi un moyen de montrer l’exemple à ses enfants. En outre, quand on est sûr de ses choix, qu’on les a pris en conscience et qu’on les fait avec conviction, il y a du sens ce qui rend l’épreuve plus simple.

Le "Nid" création de Pâques de la Délicatisserie.

7- D’où vous vient ce goût pour le pain ?

Quand j’ai commencé à travailler en boulangerie, je n’y connaissais rien du tout. Néanmoins le côté vivant du pain m’attirait et j’étais heureuse de pouvoir créer quelque chose avec mes mains à partir d’un produit brut. En outre, le pain est un produit qui rassemble et qui symbolise le partage. Pour finir, lorsque j’étais chez Paillet à la Rochelle, j’ai eu la chance d’avoir comme maître d’apprentissage un boulanger qui m’a transmis sa passion du métier avant de partir à la retraite. 

Une bonne pâtisserie ne demande pas de réflexion. On la mange avec plaisir sans se poser de questions.

8- Comment pourriez-vous décrire votre identité en pâtisserie ?

Chacun de mes gâteaux a un sens. Je n’essaye pas de faire le meilleur gâteau en assemblant des bonnes recettes. Quand je crée une pâtisserie, je l’accepte dans sa globalité, avec ses défauts et ses qualités. Si je fais une tarte Tatin par exemple, elle va être un peu sucrée mais c’est ce que nos clients aiment et attendent. Pour moi une bonne pâtisserie ne demande pas de réflexion. On la mange avec plaisir sans se poser de questions. L’équilibre des saveurs passe inaperçu, c’est un moment de douceur. 

9- Votre création de Pâques « Le Nid » est-elle un hommage à votre enfance en Alsace ?

Mon enfance en Alsace a en effet inspiré cette création composée d’un biscuit de Savoie, d’un confit de citron, d’une légère bavaroise à la vanille et d’un crumble à l’amande. Cet entremets dont les lignes rappellent celles du kouglof représente un nid au centre duquel des oeufs en chocolat évoquent la chasse pratiquée lors des fêtes de Pâques. Cette création ne parlera peut-être pas immédiatement à tout le monde car elle résonne avec mon histoire mais chaque client pourra se l’approprier à la dégustation. Ils créeront ainsi leur propre histoire et leurs souvenirs.

La galette des rois Notre-Dame de la cheffe pâtissière Nina Métayer.

10- Quelles sont vos pâtisseries emblématiques ?

La « Fleur » est particulièrement appréciée par nos clients. Globalement nous avons une gamme classique avec des pâtisseries intemporelles à l’image de la tarte chocolat ou le flan, et une gamme plus novatrice avec des associations de saveurs plus recherchées telles que l’entremets chocolat-olives

À mi-chemin entre la pâtisserie et la boulangerie, il y a la galette des rois. C’est un produit que j’aime particulièrement travailler et nos clients l’attendent chaque année avec impatience. En 2020, j’avais fait une galette avec une tuile dentelle représentant la rosace de la cathédrale Notre-Dame de Paris. Cette création avait beaucoup marqué les esprits.

Je pense que la culture du goût se transmet.

12- La cuisine, une histoire de famille ?

En effet ! Mes parents étaient critiques culinaires pour le petit Futé. Chez nous, la cuisine tient une place centrale, c’est dans notre identité. Quand on part en vacances par exemple, on choisit une destination où l’on mange bien. Je pense que la culture du goût se transmet. D’ailleurs, une de mes soeurs travaille avec moi et la deuxième est cheffe de cuisine dans un restaurant.

Quant à mes filles, elles attendent le week-end avec impatience pour que l’on puisse faire un atelier de pâtisserie ensemble. Et c’est une bonne chose ! D’une part ça leur permet de comprendre mon métier. D’autre part, je trouve que la pâtisserie est une activité extrêmement complète pour les enfants. En effet, ça leur apprend à lire et à compter. C’est un moment de partage valorisant dans la mesure où ils réalisent quelque chose avec leurs mains. Qui plus est, les enfants ont énormément de compétences en pâtisserie. À mes yeux, c’est une activité qui devrait être obligatoire dans leur éducation (sourire).

13- Pour vous, quelles sont les qualités requises pour atteindre l’excellence? 

La force de travail et la remise en question. Il faut savoir se remettre en question aussi bien dans le positif que dans le négatif. À la fin de la journée, après avoir pris un peu de recul, il est important de valoriser ses réussites tout en analysant de manière objective les points à améliorer dans l’objectif de faire mieux la prochaine fois. Généralement, les femmes ont tendance à beaucoup se remettre en question mais à ne pas assez se féliciter. 

Il faut également de la bienveillance et de la douceur envers soi. Je pense que quand on s’aime suffisamment, on est naturellement bienveillant avec autrui. Et pour finir, il est important d’être lucide. Nous ne sommes pas parfaits mais quand on accepte ses propres imperfections on est plus tolérant envers les autres. 

La Délicatisserie par Nina Métayer

Site

Photos de portrait et galette des rois : Instagram Nina Métayer

Photos de la Fleur et du Nid : Louise Marinig




Vous Aimerez Également