Références gastronomiques

La Truffe : tout ce qu’il faut savoir !

11 mars 2025
Tout savoir sur la truffe noire

La truffe est un champignon souterrain très prisé en gastronomie, en particulier dans la cuisine française et italienne. Avec son arôme puissant et son goût raffiné, quelques copeaux suffisent à sublimer les plats les plus simples tels qu’un oeuf à la coque, des pâtes ou un écrasé de pommes de terre. Surnommé le « diamant noir », la truffe pousse en symbiose avec les racines de certains arbres comme le chêne ou le tilleul. La récolte, appelée cavage, est traditionnellement effectuée à l’aide de chiens élevés dès leur plus jeune âge à détecter le parfum de ce champignon mystérieux qui pousse sous terre.

Hughes Blachère, président de l’association des Artisans de la truffe noire nous parle de ce merveilleux produit dont 60% de la production nationale se trouve dans le Tricastin, faisant de la Drôme provençale la première région trufficole de France. Les différentes variétés, la saisonnalité, comment la conserver et la cuisiner… vous saurez tout sur le diamant noir ! Je vous raconterai ensuite mon expérience, entre cavage, oenotourisme et repas gastronomique, sur la route de la truffe. 

1- Hughes Blachère, pouvez-vous vous présenter ?

Je suis président de l’association des Artisans de la truffe noire. Le but de cette association est de défendre la truffe noire du Tricastin en montrant sa singularité à travers son terroir, son histoire, sa culture et ses qualités organoleptiques. 

2- Existe-t-il différentes variétés de truffes ? 

On recense une quarantaine de variétés de truffes dans le monde, dont une petite dizaine possède des qualités organoleptiques acceptables. À mes yeux, seules quatre variétés ont un intérêt gastronomique. Il s’agit de : 

  • La « tuber magnatum pico » également appelée « truffe blanche d’Alba » est le joyau blanc de la cuisine italienne. Elle est appréciée pour ses arômes aillacés très puissants.
  • La « tuber melanosporum » dont fait partie la truffe du Tricastin. Il est préférable de l’ajouter dans des plats simples tels qu’un oeuf au plat, des pâtes ou encore un écrasé de pommes de terre mais attention, elle perd ses arômes dès que la température atteint 70 degrés. Elle se récolte de novembre à mars, mais c’est entre la mi-janvier et la mi-février qu’elle est la plus parfumée.  
  • La « tuber brumal » est  moins chère que la « tuber melanosporum » et ne craint pas de monter en température. Elle se glissera volontiers dans vos gratins dauphinois et vos viandes cuisinées.  
  • La « tuber aestivum » ou « truffe d’été » est récoltée entre les mois de mai et de septembre. Son goût est moins intense que la truffe d’hiver mais son prix est plus abordable.

3 – Comment distinguer ces quatre variétés ? 

  • La « tuber magnatum pico » est blanche avec une peau lisse. 
  • La « tuber melanosporum » est noire. Son péridium (enveloppe extérieure) est en pointe de diamant, d’où son surnom de « diamant noir ». Elle possède des veines aérifères blanches assez fines. Au nez, son parfum est plus complexe que la « tuber brumale ».
  • La « tuber brumale » a un péridium qui se détache facilement à l’ongle. Elle possède des veines aérifères plus épaisses que la « tuber melanosporum » et un parfum de sous-bois plus fort. 
  • La « tuber aestivum » est noire à l’extérieur et de couleur crème à bistre à l’intérieur. 

4 – Quelles sont les conditions propices au développement de la truffe ? 

La truffe se développe de préférence sur des sols calcaires, dans des régions où le climat est de type méditerranéen . Une faible pluie lui suffit pour s’épanouir. Toutefois, les orages du 14 juillet et du 15 août sont fondamentaux dans le développement de la truffe.

En outre, la truffe est le résultat d’une symbiose entre un végétal et un champignon. En Drôme provençale, il n’est pas rare de trouver des truffes aux pieds d’un chêne ou d’une racine de lavande. La truffe blanche d’Alba, quant à elle, se développe volontiers aux pieds des peupliers, des saules ou encore des tilleuls. 

5 – Comment décririez-vous le parfum singulier de la truffe ? 

À ce jour, nous n’avons pas un vocabulaire assez riche pour décrire ce parfum subtil et complexe. Je souhaite organiser des séances de dégustation avec des chefs étoilés dans le but de trouver un vocabulaire plus précis. Aujourd’hui nous utilisons des mots génériques qui ne reflètent pas toute la palette aromatique de ce merveilleux produit.

6 – Est-ce que les truffes provenant de l’étranger ont un intérêt gustatif similaire à celui des truffes françaises ? 

Si c’est de la « tuber melanosporum », oui. Ce qui va faire la différence c’est le respect du produit, c’est-à-dire la manière dont la truffe est cultivée, récoltée et commercialisée. Sur le Tricastin, les truffes sont sorties de terre 48h ou 72h avant d’être vendues. Elles n’ont connu ni transport, ni chambre froide. Vous les mangerez à la quintessence de leur fraîcheur et de leur goût.

7 – Comment bien conserver une truffe fraîche ?

Je vous recommande d’acheter vos truffes entre mi-janvier et mi-février, quand elles sont à pleine maturité. Il faut les brosser pour qu’elles soient bien propres, les mettre sous-vide et les congeler. La truffe congelée perd très peu d’arôme. Au moment où vous voulez les manger, il ne faut pas les décongeler, au risque de les voir s’affaisser. Je vous conseille de les sortir quatre ou cinq minutes avant de les travailler. Vous pouvez les râper sur des oeufs, sur un écrasé de pommes de terre, sur un rôti de boeuf, etc.

Autre solution, vous pouvez faire un beurre truffé. Il suffit de mettre 20g de truffe dans 100g de beurre, de malaxer le tout puis de le congeler. Au moment où les papilles se réveillent mais que les truffes fraîches ne sont pas encore matures, vous pouvez sortir 20g de beurre truffé et l’écraser sur des pommes de terre ou l’étaler sur du pain pour accompagner des oeufs à la coque. 

Si vous souhaitez manger votre truffe fraîche, je vous recommande de la mettre en bas de votre réfrigérateur, dans une boîte avec des oeufs et un papier absorbant. La truffe étant pleine d’eau, il faudra changer le papier absorbant tous les deux jours. En respectant ces consignes, vous pourrez garder votre truffe quelques jours voire une petite semaine. 

8 – Quelle quantité de truffe faut-il prévoir par personne ? 

Il faut compter 10g de truffe par personne et par plat. Pour information, une petite truffe d’un centimètre et demi de diamètre pèse environ 15g. Si vous faîtes un écrasé de pommes de terre, il faut prévoir 40g de truffe pour un coût d’environ 40€ (1000€ le kilo en pleine saison). À titre comparatif, quatre douzaine d’huîtres coûtent environ 60€.

9 – Quels sont les ennemis de la truffe ?

Les premiers ennemis de la truffe sont les arômes naturels et artificiels. Les premiers sont créés à partir de substances naturels (navet, choux, etc.) dont l’assemblage ressemble au goût de truffe. Les arômes artificiels, quant à eux, sont produits à partir d’une molécule chimique qui imite approximativement le goût de la truffe.

Ces produits dits « à la truffe » que l’on voie fleurir partout sont peu chers à fabriquer et vendus au prix fort. Il n’y a qu’un pas pour dire qu’on prend le consommateur pour …une truffe ! Je pense notamment à l’huile à la truffe qui est une aberration pour une raison simple : le champignon est gorgé d’eau. Jusqu’à preuve du contraire, l’eau et l’huile ne sont pas miscibles.

Les seconds ennemis de la truffe sont les industriels. En produisant de grandes quantités de truffes, ces derniers pénalisent toute la filière, et notamment les paysans du Tricastin qui ne peuvent pas résister à la baisse des cours. Notre association défend un modèle paysan comparativement à un modèle de production agro-industriel. 

10 – Est-il préférable de caver avec un chien ou un cochon truffier ?

À une époque, on trouvait facilement un cochon dans les familles. Mais les moeurs ont changé et cette pratique est devenue folklorique. Le chien a moins de flair que le cochon, mais il est plus adapté pour le cavage. Le cochon a tendance à abimer les truffes avec son groin, et parfois même à les manger. Un chien bien dressé s’arrête de gratter au bon moment et attend d’être récompensé. 

Il est également possible de caver à la mouche. L’Helomyza Tuberivora a coutume de pondre ses oeufs à l’aplomb d’une truffe mature. À l’aide d’une badine, le trufficulteur observe le mouvement de la mouche. Si elle revient au même endroit, il y a de forte chance qu’il y ait une truffe. Cette technique est fastidieuse mais c’est un bon moyen d’être en communion avec la nature.

11 – Les chiens truffiers doivent-ils être sensibilisés dès leur plus jeune âge au parfum de la truffe ?

C’est préférable. En Drôme provençale, les paysans ont coutume de mettre de la pâte de truffe sur les mamelles de la mère pour familiariser les chiots au parfum du champignon quand il tête. 

Depuis quelques temps, on voit beaucoup de Logotto Romagnolo, une race de chien originaire d’Italie, aux côtés des trufficulteurs. Cependant, tous les chiens peuvent être de très bon truffiers à condition d’avoir un bon flair et d’être bien élevés. 

12 – Quelles activités autour de la truffe recommanderiez-vous ? 

Notre association a créé « La route de la truffe noire », un circuit culturel et gourmand autour du diamant noir. Les sites et événements proposés sont listés sur notre site Destination Truffes. Nous recensons tout ce que l’on peut faire dans les alentours et il y a de quoi faire ! Entre visites insolites, restaurants gastronomiques, hébergement de charme, balades dans des villages pittoresques, marchés de producteurs, rencontre avec les trufficulteurs, dégustation dans des domaines viticoles, etc. Des expériences conviviales et ludiques à vivre entre amis ou en famille. 

La Plume d’Adam sur la Route de la Truffe noire !

Amatrice du diamant noir, je ne pouvais qu’être séduite par les événements proposés sur le site Destination Truffes. C’est en pleine saison du précieux champignon que je suis partie en direction de la Drôme provençale. 

L’expérience a commencé par un dîner au sein du restaurant étoilé le Clair de la Plume. Au menu, de belles créations dont deux autour de la truffe : céleri très truffe (céleri rave gourmand, voile de truffe) et un dessert pour lequel je reviendrai volontiers tant il m’a marqué, une truffe à la belle Hélène (poire crousti-confite et caramel chocolaté). 

Le lendemain, c’est au domaine de Grangeneuve que l’aventure s’est poursuivie, avec un déjeuner autour de la truffe et du vin. Autour d’un tonneau en bois, les assiettes se sont succédées : tartines de beurre truffé, ravioles à la crème et aux truffes, coquille Saint-Jacques et salade de pommes de terre truffée, Brillât-Savarin truffé, choux fourrés à la chantilly truffée. En cuisine, la famille Bour n’a pas manqué de générosité, sous le regard attentif de Simone, leur chien truffier

Le repas terminé, direction les champs de chênes pour caver. L’occasion de partager un moment de complicité entre un trufficulteur et son chien, de pratiquer une activité en plein air, et de sentir la puissance aromatique d’une truffe sortie fraîchement de terre… Bonus : si vous le souhaitez, il est possible de repartir avec une partie du butin et/ou de boire un verre de vin au domaine (voir conditions avec le trufficulteur). 

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